Les régions productrices de whisky écossais ont longtemps servi de référence pour décrire le goût d’un whisky. Bien que ces références restent utiles, de plus en plus de distilleries défient les attentes traditionnelles et s’aventurent hors des sentiers battus. À l’occasion du lancement de notre dernière édition limitée « Heresy », Julien Willems révèle que le Batch 32 Fife Peaty Potion est hérétique à plus d’un titre.
La sagesse traditionnelle en matière de whisky voudrait vous faire croire que le whisky des Lowlands est léger, herbacé et floral. Elle vous dit également qu’il ne faut pas ajouter d’eau à votre whisky ou que plus un whisky est foncé, plus il est vieux – deux idées auxquelles nous n’accordons guère d’importance ici, à la Society. De l’autre côté de l’eau, en face d’Édimbourg, une nouvelle distillerie cherche à rompre avec la saveur conventionnelle des Lowlands et, en produisant un whisky tourbé et non tourbé, ramène la fumée dans le royaume de Fife. Tirant parti de cet esprit non conformiste, le Batch 32 Fife Peaty Potion vient compléter à merveille notre gamme « Heresy ».
L’un des nombreux points intéressants de cette distillerie de Fife est qu’elle utilise un filtre à moût à la place d’une cuve de brassage traditionnelle. Je passerai sur les détails techniques, mais en termes de saveur, cela permet d’obtenir des spiritueux purs, avec moins de saveurs céréalières, laissant ainsi s’exprimer les esters fruités. La distillerie utilise diverses céréales autres que l’orge, et le filtre à moût permet un processus beaucoup plus fluide qu’une cuve de brassage traditionnelle. Cet équipement est plus courant dans le monde de la brasserie, et bien qu’il soit rare dans la production de whisky écossais, il n’est pas inconnu. Dans les Highlands, la distillerie 59 a installé son propre filtre à moût en 2000 et produit un whisky délicieux que nous aimons mettre en bouteille. Lorsque d’autres produits de cette distillerie de Fife arriveront dans les rayons de la Society, il sera intéressant de les déguster en parallèle avec ceux de la distillerie 59 afin de voir s’il existe des similitudes dans leur profil aromatique.
Cette expression, bien que techniquement toujours un single malt, combine les produits tourbés et non tourbés de cette distillerie. Nous avons élaboré ce mélange avec soin, en combinant différents lots afin d’obtenir les niveaux de fumée et de tourbe adéquats. Nous avons ensuite mis le single malt légèrement tourbé ainsi obtenu dans des fûts neufs. Le Fife Peaty Potion est le résultat de la combinaison de deux de ces fûts.
L’un d’eux contenait auparavant un sherry Pedro Ximénez extrêmement sucré, tandis que l’autre contenait un sherry Oloroso sec, les deux influences se mélangeant pour créer une seconde couche de saveurs hérétiques.
Après 18 mois dans ces deux fûts de sherry, les deux fûts ont été combinés pour produire une expérience tourbée bien équilibrée avec les influences des sherrys. Des arômes sucrés, goudronnés et médicinaux sont accompagnés de caramel fumé et de prunes cuites au four, avec une dimension distincte de dunnage. Comme l’a souligné le panel, c’est un whisky très agréable qui évite tout extrême et qui, par conséquent, est apaisant, réconfortant et réchauffant.
Ce whisky de Fife rejoint un autre groupe d’aventuriers des Lowlands, tels que les distilleries 50 et 156, qui utilisent depuis un certain temps déjà du malt tourbé.
Rappelons-nous donc que la tradition ancestrale du whisky des Lowlands n’est peut-être plus aussi pertinente qu’elle l’était autrefois. L’époque où les régions productrices de whisky écossais n’offraient qu’un seul profil aromatique est révolue, et plusieurs distilleries des Lowlands ont choisi de sortir des sentiers battus. Découvrez à travers le Fife Peaty Potion la nouvelle ère d’un ancien royaume.
Batch 32 – Fife Peaty Potion
Issu d’une distillerie avant-gardiste et résolument moderne de Fife, ce single malt unique produit en petite quantité est une délicieuse potion tourbée. Nous avons choisi d’assembler deux styles de single malt produits dans cette distillerie, l’un non tourbé et l’autre fortement tourbé. Nous avons marié le mélange obtenu dans des fûts de sherry PX et oloroso de premier remplissage pendant environ 18 mois avant de le mettre en bouteille à un stade de maturation idéal, où se mêlent des arômes d’orange, de raisin sec et de fumée parfumée. Le nez pur était merveilleusement vif, plein de teintures médicinales, de bruyère fumante, d’oxyde de zinc et de crème de lanoline, de cuir neuf, de braises de tourbe dans un foyer et, sous-jacentes à tout cela, quelques notes réconfortantes de goudron et des suggestions de boîte à outils de mécanicien. La réduction a fait apparaître des huiles d’orange, du camphre, une odeur de moisi, du caramel fumé, des prunes cuites à la mélasse, puis des notes épicées et marmeladées. La bouche pure était un mélange de fruits noirs et rouges, mélangés à de la fumée de bois, du pain noir, de la racine de réglisse, des extraits de plantes et de la sauce brune de friterie. L’eau a fait ressortir l’amertume du chocolat noir haut de gamme, ajouté des notes d’herbes séchées et apporté une touche carbolique acidulée, avec une chaleur poivrée et des oranges flambées en finale.
